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L’ écume des fils

 

« LES RENDUS EMOTIFS »

…Des dix vingt mille heures de travail. Que c’est des mises à jour les oeuvres. Ca se débrousse comme le temple d’Angkor. C’est de l’acharnement de terrassier… de terrassier d’ondes… *(L’ aiguille) est un scalpel de mage… Tout est enfoui dans l’atmosphère… Faut fouiller plan par plan… souffler, oh si doucement… que le sable envole… C’est horrible n’est-ce pas, c’est horrible… Je veux dire la délicatesse d’effleurement… *(La Plume)

– L.F. Céline –

De la toile à patron modelée en costume ou vêtement à la toile feuille blanche, ma pratique de costumière-styliste s’est métamorphosée par magie en exploration de la fibre textile. Habitée par la volonté de lier entre eux, textile, perception du monde, émotions, mémoire, la toile en est devenue paysage humain.

DEMARCHE ET MEDIUM

J’ utilise la plupart du temps ce médium comme support-surface en m’attelant aux problèmes formels générés par le textile et le fil. De petits fragments de tissu à priori « insignifiants » s’articulent les uns avec les autres, à la manière de collages, se transformant en ressources, en  » jardin extraordinaire » ; au fur et à mesure chaque lambeau de matière découpée inscrit l’ébauche du sujet au fil, peu à peu la fenêtre aveugle s’invente une histoire visuelle. Mettre en scène des éléments disparates, c’est, les additionner ou les opposer les uns aux autres, sans maquette préalable, sans croquis… c’est toute cette imprévisibilité-là qui donnera sa vitalité à chaque création.

SUJET

« … Bien poser un problème n’est pas le supposer d’avance résolu, prévient André Gide dans « L’ Immoraliste » (roman 1902) . « C’est à contrecoeur que j’emploie ici le mot “problème”. À vrai dire, en art, il n’y a pas de problèmes – dont l’ oeuvre d’art ne soit la suffisante solution… », ajoute-t-il.

Le sujet c’est le fil, pas de « mythologie personnelle » et, chaque réalisation est une approche libre et expérimentale qui tire profit des qualités uniques des matériaux utilisés..

Je me range spontanément et résolument aux côtés de ceux, mutiques, qui ne font jamais que mettre en lumière à force de réalisations, l’évidence de leur expérience, c’est mon penchant pour l’oeuvre dite des « nouveaux primitifs ou art brut ». Par exemple, celle de Jacques TROVIC, pour ne citer que lui. Ce médium est prétexte à « figurer » des histoires et à questionner.

LABORATOIRE D’ ECRITURE TEXTILE

Parce que le choix du médium influence le regard, mon but est de valoriser une écriture textile. Le choix des points détermine le choix de l’écriture, question qui se pose et se résout sur la toile. Le style dépend de la manière dont on lie par le fil, le dessin à sa base.

Tels des vaisseaux  capillaires, un maillage de fils, par accumulation de points brodés « à l’arrache ! » conduit les nuances de couleur et libère matière et forme en amenant de la « picturalité ». C’est par superposition de plusieurs couches qu’on obtient comme pour un glacis, une diffraction de la lumière.


EXPLORATIONS TEXTILES

Partir d’une idée aux frontières indéfinies, esthétique et projet remis en question dans un dialogue engagé avec ce qui est en train d’apparaître, à chaque étape de l’évolution, ressemble à un fourmillement par accumulation de fils… Ne pas définir le cadre dans lequel se jouera une interaction entre matière créée et support, offre plus d’opportunités, dans un voyage où tout peut advenir : obstacles, passerelles, changement de décor inattendu, chemins de traverse… Je ne peux savoir là où vont m’entraîner technique et imaginaire, rien ne me permet de connaître à l’avance ni le temps de l’accomplissement d’un projet, ni aucun des paramètres qui seront mis en jeu au fil de l’évolution du projet.